Bernard Jacquelin, druide "Allobrognatos", raconte...

Les Druides Jacquelin et Tillenon

Les peuples qui précédaient les Celtes (et qui participèrent à leur civilisation par assimilation) étaient les Ligures.

En Savoie, les peuples dont nous connaissons l'existence sont :

* la "nation" des Allobroges, composée de petits peuples dont les traces subsistent dans les "pays" de Savoie (Bornes, Albanais, Bauges, Chablais...) dont le territoire s'étendait de Vienne à Genève, plutôt dans l'avant-pays,

* Les Médulles, dont le territoire était délimité par la vallée de la Maurienne,

* Les Ceutrons, présents en Tarentaise et dans les pays du Mont Blanc

* Les Salasses, pour le Val d'Aoste sur le versant piémontais des Alpes

* Les Nantuates, qui habitaient sur les rives du lac Léman.

Les voisins directs s'appelaient les Helvètes, les Aulerques-Brannovices (plaine de l'Ain), les Ambarres (Ambérieu...). Le Rhône établissait une frontière naturelle, et les points de passage étaient, entre autres, Genève (Genava), Seyssel (Condate), Lyon (Lugdunum)...

La langue celte unifiée, le celte ancien d'origine indo-européenne s'approche aussi de la langue de Ur proche de l'ancêtre du latin

Le nom de Celte (keltoi) apparaît chez les auteurs grecs du V° siècle, puis ce sera Galli en latin pour désigner les peuples gaulois. Les Gaulois sont installés de part et d'autre des Alpes.

Les celtes apparaissent au 8° siècle, alors que l'âge du bronze décline. On retient deux grandes époques :

* l'époque de Hallstatt (-800 à -400), d'où émerge la technologie de la métallurgie du fer

* l'époque de La Tène (-400 à -52), qui correspond pleinement à l'ère gauloise et l'apogée de la civilisation celtique.

Les origines de ce peuple se trouvent au sud de l’Allemagne vers -2000.

entre -2000 et -1200 ( on ne sait pas trop) première vague de migration celtique vers les lies britanniques ( q-celts parlant le Goidelic )

-1000 2° vague de migration celtique vers les iles britanniques ( p-celts parlant le brytonic le welsh le cornish)

-1000 invasion de la Gaule l'Espagne, l'Italie les Balkans l'Asie Mineure ( Galatie)

Galatie: ancienne région du centre de l'Asie mineure ( sud de la mer noire )

LA PERIODE DE HALLSTATT

Cette période est définie grâce aux découvertes faîtes à la nécropole de Hallstatt (Autriche). Elle correspond au Premier Age du Fer.

C'est près de 2000 sépultures qui ont été fouillées et qui ont permis d'établir une chronologie précise de cette période.

On voit apparaître une civilisation dont une classe de nobles guerriers témoigne de leur puissance dans de somptueuses sépultures. Ils gisent le plus souvent près de leur char, entourés d'armes (grandes épées et poignards de fer) et d'offrandes alimentaires.

Les artistes de cette époque décorent les armes et les bijoux avec des motifs géométriques, spirales, cercles, roues, symboles solaires typiques. Le Torque fait son apparition.

A cette période succédera la période correspond au second âge du fer : l'époque de La Tène.

En pays de Savoie, cette période est attestée en Haute Tarentaise, en Haute Maurienne, dans l'avant-pays et plus particulièrement dans l'Albanais et le bassin annécien (Gruffy, Pringy, Quintal, Annecy-le-vieux, Talloires, Faverges).

Depuis la seconde moitié du Ve s., des infiltrations de population celtique concernent le nord de l'Italie.

Vers la fin du 5e siècle avant J. C. Après de nombreuses décennies de voisinage pacifique, les Celtes décident d’envahir plusieurs territoires....tous ceux qui l’entourent (Angleterre, Belgique, France, Italie, Espagne, Autriche, Hongrie, etc.) Parce que ses nombreuses attaques sont désordonnées l’empire celtique tombe rapidement.

Vers -150, la France, l’Angleterre et l’Irlande sont les seuls territoires qui demeurent celtiques .

La vie des habitants était fondée sur des clans dirigés par des princes locaux qui eux étaient sous l’autorité de druides (prêtre, docteur, devin, enseignant, juge). Ils sont d’excellents techniciens et ils possèdent une métallurgie du fer d’un niveau remarquable, ils sont les premiers à ferrer les chevaux et on leur attribue l’invention de la charrue à roues. Le manque de cohésion interne a mis fin à leur indépendance.

-400 Les Etrusques sont chassés de la plaine du Po et diverses tribus s'installent dans ce qui deviendra plus tard la Gaule Cisalpine. Il s'agit mouvements migratoires effectués en plusieurs générations.

La prise de Rome de -387 fut vécue comme un véritable cataclysme et est à l'origine de ce Metus Gallicus, de cette peur du Gaulois qui ne cessera qu'avec la Guerre des Gaules. Les mouvements migratoires des Celtes se prolongent pendant plusieurs générations.

A la seconde moitié du Ve siècle des populations celtiques vivaient encore dans le nord de l'Italie . On les connaît sous le nom de culture de Golasecca, implantée dans la région des Lacs, au pied des Alpes. Ces Celtes italiens devaient jouer, pendant une partie de la période de Hallstatt, un rôle important d'intermédiaire entre les cités étrusques et les Princes de l'Europe tempérée.

milieu V° siècle av JC

Le second Age du Fer (nommé "laténien" en fonction des découvertes faites sur le site de la Tène en Suisse) commence vers le milieu du Ve s. C'est précisément à cette époque qu'un Méditerranéen, Himilcon, carthaginois de son état, croise au large de l'Armorique.

Plus d'un siècle plus tard, vers 330-300, c'est un Massaliote, Pythéas, qui longe les côtes atlantiques et nous donne les premiers noms de lieux (Ouximasa: Ouessant? ; cap Kabaïon: pointe de Penmarc'h?) et celui d'un peuple (Ostimioi: Osismes?). Quant aux autres cités celto-armoricaines, nous ne connaissons leur nom qu'au Ier siècle av. J.-C., à l'occasion de la conquête césarienne.

Les Coriosolites, les Riedones, les Namnètes et même les célèbres Vénètes n'entrent dans l'Histoire qu'au moment de leur soumission à Rome.

L'époque de la Tène

La Tène et l'expansion celtique : (tirée de la revue Nouvelle Ecole N°17)

-500-480 : La tène I : premières invasions celtiques en Gaule et dans le Nord de l'Italie. Première mention des Celtes chez Hécatée de Milet.

-450 : Migrations celtiques en Grande Bretagne. Sépultures de Rodenbach (Rhénanie) et Gorge Meillet (Champagne). Hérodote parle des Celtes.

-400 : Les Celtes devant Marseille. Ils sont chassés des massifs du Harz.

-396 : Seconde vague d'invasions celtiques dans la plaine du Pô. Les Gaulois s'emparent de Melpum (Milan). Sépulture de Rheineim.

-390 : Gaulois et Romains s'affrontent à Clusium.

-387 : Bataille de l'Allia. Les Romains sont écrasés par Brennus et les Sennons. Siège du Capitole. Incendie et prise de Rome par Ambicat.

-379 : Denys l'Ancien, tyran de Syracuse, s'allie aux Celtes devant Crotone.

-368 : Denys envoie des mercenaires celtes dans le Péloponnèse.

-354 : Rome fait alliance avec les Samnites pour combattre les Gaulois.

-350 : Les Gaulois s'emparent de Bologne. Déclin de l'Etrurie du Nord. Les Boïens s'installent en Bohême. Les Celtes atteignent et traversent le Danube.

-335 : Les Celtes des Balkans envoient une ambassade à Alexandre. Premières monnaies gauloises. Sépulture princière de Waldalgesheim.

-320 : Afflux de statères d'or de Philippe II chez les Celtes.

-310 : Invasions celtiques en Illyrie.

-300 Partiellement détruits par les germains nouvelles migrations en Galatie

Un siècle après leur installation en Italie, de nouvelles bandes, qui s'étaient dirigées vers les Balkans, descendent en Macédoine puis en Grèce et s'attaquent au plus sacré des sanctuaires: Delphes. Cet épisode marqua profondément les esprits dans toute la Méditerranée, par l'acte sacrilège lui-même, mais aussi par la punition qui s'ensuivit, car Apollon se vengea grâce aux armes étoliennes. Les Keltoi se séparèrent et une troupe se dirigea vers l'Egypte pour se mettre au service du Pharaon Ptolémée II.

Engagés comme mercenaires, les guerriers celtes se révoltèrent en -275 et 4000 d'entre eux furent exterminés ; massacre qui fut considéré comme la vengeance définitive d'Apollon et d'Artémis

-300 : La Tène II : Conquète de la Gaule méridionale par les Celtes. Les Gaulois triomphent à Clusium (299), mais sont battus à Sentinum (295).

-279 : Invasion des Celtes Galates en Thrace, en Macédoine et en Asie Mineure. Brennus occupe et pille la ville de Delphes. Fondation du Royaume de Bithynie (Tylis).

-275 : Antiochos I repousse les Celtes, qui s'établissent en Galatie.

-250 : Apparition des Belges dans le Nord de la Gaule. Nouvelles invasions celtiques en Cisalpine et dans la plaine du Pô.

D'autres Celtes, qui s'étaient dirigés vers la Thrace puis l'Asie, luttèrent comme mercenaires, puis furent invités à s'installer dans le territoire qui deviendra la Galatie, en Phrygie orientale.

Jusqu'en -230, ces Galates rançonnèrent une grande partie de la Phrygie et de la Lydie, mais Attale Ier ( Attalides de Pergame ( Nord est de la Grèce Truquie et Sud de la Bulgarie ) d'origine héllénistique légué à Rome par son dernier roi en -133 ) osa les affronter en bataille rangée dans le dernier tiers du IIIe s( -230 ). et il les vainquit à de nombreuses reprises. Ces victoires furent célébrées dans tout le monde grec et atteignirent la dimension du mythe.

-225 : Défaite Gauloise de Télamon.

-222 : Les Boïens, appuyés par des auxiliaires germains, livrent bataille à Clastidium et sont battus par les Romains.

-200 Autonomie de l'état en Galatie

-190 : Défaite des Celtes en Italie du Nord. Les Galates sont battus par Eumène II (184).

-181 - 174 : Première guerre celtibère

Vers -150, la France, l’Angleterre et l’Irlande sont les seuls territoires qui demeurent celtiques .

-154 - 152 : Deuxième guerre celtibère à laquelle Marcellus met fin.

-144 : Troisième guerre celtibère

-134 - 133 : Prise et destruction de Numance par Scipion Emilien.

-125 - 118 : Les Romains pénètrent en Cisalpine. Ahenobarbus bat les Allobroges (122). Défaite de Bituit, roi des Arvernes (121). Conquête et reddition de la Gaule du Sud. Création de la Narbonnaise, province romaine (120).

-100 Presque entièrement détruits par les Romains seuls subsistèrent les royaumes d'Irlande

-25 Annexion romaine de la Galatie

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Yann-Ber TILLENON. Kêrvreizh

ALLOBROGES

L'ancien territoire  des Allobroges s'étend entre Rhône et Isère, jusqu'à Vienne, sa métropole. Ils sont  établis dans l'avant-pays. Mais la Savoie abrite aussi de petites peuplades dans les  hautes vallées de l'Isère (Ceutrons) et de l'Arc (Médulles).

Les Allobroges  et l'histoire :



Les Allobroges entrent dans l'histoire avec Polybe, puis Tite-Live qui,  à l'occasion du passage des Alpes par l'armée d'Hannibal, évoquent le peuple des Allobroges, en 218 av JC. Les Allobroges vont perdre leur indépendance en 121 av JC en  perdant une bataille contre le Consul Fabius Maximus qui prendra le surnom  "l'allobrogique", au confluent du Rhône et de l'Isère. Pressurés par les  Romains et leurs impôts, les Allobroges avec à leur tête CATUGNATOS (catu = combat en gaulois) se rebellent mais sont définitivement battus en 62 av JC par Manlius  Lentinus.

Polybe signale que les Alpes sont habitées par une population très  nombreuse, et Tite-Live précise que les habitations étaient informes, placées sur les  rochers, que les mulets et le bétail étaient engourdis par le froid et que les hommes  étaient velus et sans soin. Pline et Strabon évoquent les marmottes, lièvres,  chevreuils, cerfs, chamois, bouquetins et chevaux sauvages. Pline précise que le blé de  trois mois est connu dans toutes les Alpes, et que le fromage "vatusique" des Ceutrons est célèbre à Rome, enfin que les vaches, malgré leur petite taille, donnent  beaucoup de lait et que les boeufs sont attelé par la tête et non par le cou. (Aimé  BOCQUET "La Savoie des origines à l'an mil").

 
Les Gallitae trouvèrent, avons-nous dit, un élément de civilisation dans leur fixation définitive sur les bords du Verdon. A partir de cette époque, ils ne reprirent les armes que pour protéger leurs foyers, pour aller au secours de leurs alliés ou pour se venger de leurs ennemis ; à leur vie nomade et guerrière, succéda donc une vie plus tranquille et plus douce. Comme moyen de défense du territoire dont les produits devenaient pour eux le principal et peut-être l’unique moyen d’existence, ils n’eurent d’abord que des forteresses improvisées, communes à tous les Gaulois qui s’établissaient dans les montagnes
Note (1)
 C’étaient des enclos entourés d’abatis d’arbres, croisés en tous sens et dissimulés dans les forêts. C’est là qu’au premier signal du danger la peuplade, désertant ses chétives cabanes, allait s’enfermer avec ses meubles et ses troupeaux. La sécurité que trouvaient en cet endroit les femmes, les enfants et les vieillards permettait aux hommes valides de poursuivre les ennemis. A ces primitifs moyens de défense, on substitua, dès qu’on le put, des ouvrages en maçonnerie, derrière lesquels la résistance était plus facile et plus efficace.
2 - Les Romains ne pardonnèrent jamais aux Gaulois d’avoir fondé en Italie, sous le nom de Gaule Cisalpine, une puissance rivale de Rome, et ils leur jurèrent une haine implacable parce qu’ils s’étaient montrés sympathiques à Annibal, lorsqu’il traversa la Gaule.
 Les Gaulois leur rendirent haine, pour haine et cet antagonisme, qui éclata sur tous les champs de bataille de l’Europe, de l’Afrique et de l’Asie, eut son contre-coup jusque dans les montagnes des Alpes. C’est ce qui explique pourquoi les expéditions guerrières auxquelles les Gallitae prirent part avec plusieurs autres peuples alpins, depuis l’an 600 jusqu’à 49 avant Jésus-Christ, et dont l’histoire a gardé le souvenir, furent toutes dirigées contre les Romains. On sait que les guerres puniques commencèrent en 264 et finirent en 146 et que l’armée carthaginoise traversa les Alpes pendant la deuxième de ces guerres (218-201).
Or, d’après l’auteur de l’Histoire et Géographie des Basses-Alpes
Note (2) une partie de l’armée d’Annibal aurait campé sur une hauteur près de Thorame-Haute et laissé un souvenir de son passage dans les montagnes de Fours. L’aile droite de son armée aurait donc remonté le Verdon jusqu’à Allos ; le centre aurait suivi l’Ubaye, tandis que l’aile gauche arrivait dans le pays des Allobroges par la Durance ou l’Isère. Quoi qu’il en soit et sans vouloir attribuer à cette opinion une valeur historique qu’elle n’a probablement pas, il est certain que le passage d’une puissante armée , marchant vers Rome pour s’en emparer et commandée par un chef, ennemi juré du nom romain, n’a pas pu trouver indifférents les Gaulois alpins. En effet, ces peuples saisirent avec empressement cette occasion pour se déclarer les amis des ennemis des Romains, et, s’il faut en croire un historien de Nice
Note (3) l’enthousiasme fut tel que toutes les peuplades des Alpes répondirent par un formidable cri de guerre à l’appel du grand capitaine africain.
On le voit, qu’Annibal ait passé près ou loin de chez nous, qu’il ait foulé ou non notre territoire, il a fait bouillonner dans les veines le sang gaulois, et comment avec leur tempérament belliqueux, nos ancêtres auraient-ils pu résister à l’entraînement général ?
Faut-il ajouter, avec l'auteur dont je viens d’invoquer le témoignage, que nos pères, malgré quelques ébauches de civilisation, étaient encore barbares, à cette époque, et qu’à leur ardeur guerrière venait, hélas ! s’ajouter la soif du pillage et de la dévastation.
" Ces barbares, dit-il, rentrèrent presque tous dans leurs foyers chargés de butin, et ils renouvelèrent les mêmes rapines douze ans après, au passage d’Astrubal, qui conduisait des renforts au secours de son frère ."
Note (4)

3- Pendant l’intervalle entre la deuxième et la troisième guerre punique (201-149), les peuples d’une partie des Alpes se coalisèrent, sous le nom de Gallo-Ligures, pour la défense de leurs territoires, et se portèrent sur les bords du Var, d’où venait le danger. Les faits d’armes les plus remarquables de cette campagne eurent lieu de 180 à 185 avant Jésus-Christ, et ils ont été écrits par Tite-Live, Paul Orose et les historiens de Provence.
Le prêteur Laelius Baebius, qui se dirigeait vers l’Espagne à la tête de quelques légions, s’arrêta dans les Alpes-Maritimes, par ordre du Sénat, pour châtier et soumettre les habitants de cette région. Il s’empara de la ville de Cimiez et la saccagea ; il entra dans Nice, qui ne fit aucune résistance, et après avoir passé le Var, il campa à droite de ce fleuve, pour laisser reposer ses troupes avant de les engager dans les gorges des montagnes où se tenaient en observation les Oxibiens, les Décéates, les Ligaunes, les Bérites, les Nérusiens, les Gallitae, les Triullati, les Eguitures, etc. Tous ces peuples, que le danger commun avait réunis, depuis les sources de la Vaïre, du Verdon, du Var et de la Tinée, jusqu’aux rivages de la Méditerranée, surveillaient, des hauteurs de l’Estérel, les mouvements de l’armée romaine, lorsque tout à coup, pendant une nuit obscure, elles se précipitèrent comme un torrent dans le camp du général romain, qui pris à l’improviste, fut égorgé avec tous ses soldats .
Note (5)
Quelques auteurs prétendent que ce combat eut lieu en Italie, c’est-à-dire dans la Gaule Cisalpine, comme on disait alors ; mais ils sont dans l’erreur, car Tite-Live (lib.IV) dit avec une remarquable précision qu’il eut lieu près du Var et de Nice, circa Vari et Nicae confinia actum, et Paul Orose le raconte en ces termes :
" Laelius Baebius, partant pour l’Espagne, fut enveloppé par les Ligures et tué avec ses soldats dont pas un ne survécut, de sorte que la nouvelle de ce désastre fut envoyée à Rome par les habitants de Marseille, alliés des Romains."

Note (6)
Des Italiens et non des  Marseillais auraient annoncé ce désastre à Rome, s’il avait eu lieu en Italie.
Orose raconte ensuite que les mêmes peuplades gallo-liguriennes livrèrent encore bataille, quelque temps après avec le même succès, au consul Quintus Marcius, envoyé pour venger la mort de Baebius. Elles lui tuèrent, dit-il, quatre mille hommes et elles l’auraient tué lui-même, avec tous ses soldats, s’il ne s’était hâté prudemment de battre en retraite et de s’enfermer dans son camp :
Q. Marcius, consul adversus Liguras profectus superatusque, quatuor millia militum amisit et, nisi victus celeritate refugisset in castra, eamdem internecionis cladem quam Baebius ab  eisdem hostibus acceperat pertulisset.
Orose fait remarquer que Baebius et Marcius furent vaincus par les mêmes ennemis, c’est-à-dire par les mêmes peuplades gallo-liguriennes.
Les Gallitae, les Triullati, les Eguituri, les Esubiani, qui avaient pris part au premier combat, prirent donc également part au deuxième.
M. Tisserand prétend, il est vrai, que l’on ne doit pas entendre ici Gallitae ceux qui étaient fixés à Allos et à Colmars, mais les habitants de Gillètes, aujourd’hui commune du canton de Roquestéron, dans les Alpes-Maritimes, soit à cause de la similitude du nom, soit parce que Gillètes est un pays voisin des lieux où Baebius et Marcius furent vaincus, tandis que Colmars et Allos sont dans les montagnes des Alpes.
Mais l’opinion de cet historien est inadmissible, car la tradition, les  historiens de Provence et surtout la teneur de l’inscription de la Turbie ne permettent pas, comme nous le verrons bientôt, en parlant de la conquête des Alpes par l’empereur Auguste, qu’on place les Gallitae hors de la vallée du Verdon. La situation géographique n’offre pas une difficulté plus sérieuse, puisque, d’après M. Tisserand lui-même, les habitants de la Tinée, les Eguituri, les Triullati, etc. . , voisins d’Allos et de Colmars, combattaient à côté des Gallitae. Les uns et les autres, par une tactique habile, étaient donc allés, loin de leurs foyers, combattre les ennemis implacables du nom gaulois.
C’est en réunissant ainsi leurs forces qu’ils purent, selon la remarque d’un autre historien de Nice
Note (7) résister aux légions romaines et conserver encore leur indépendance pendant de longues années.

4.- En 61 avant l’ère chrétienne, par conséquent 150 ans environ après le massacre des légions de Laelius Baebius et la défaite de Quintus Marcius sur les bords du Var, Cotugnat ou Cottius, roi des Allobroges, appela aux armes tous les habitants des Alpes occidentales. Ce roi possédait douze tribus ou cantons depuis la Suisse jusqu’à Embrun, et il gémissait de voir ses sujets accablés d’impôts et de vexations par les questeurs romains. Cet appel fut entendu, et les Gallitae, comme les peuplades voisines, se préparèrent à la guerre parce qu’elles étaient menacées du joug sous lequel gémissaient les Allobroges.
 Lorsque les Romains eurent connaissance de ce mouvement, qui se produisait en même temps chez les peuplades qui leur étaient déjà soumises, comme les Allobroges, et parmi celles qui étaient encore indépendantes, comme la confédération des Albiciens, le prêteur Promptinus dirigea aussitôt contre elles son lieutenant Manlius Lentius.
Celui-ci, après avoir établi des garnisons à Nice et à Antibes, marcha vers Vence et il s’empara de cette ville. Mais, attaqué par les tribus de cette région et des pays voisins, il fut obligé de s’éloigner et il se vengea en ravageant les campagnes.
Cependant  Cotugnat, sachant par des émissaires que les peuples alpins avaient répondu à son appel et étaient sur le pied de guerre, essaya d’opérer sa jonction avec eux.
Note (8)
Il remontait la Durance et le Verdon, lorsqu’il fut arrêté dans sa marche par Promptinus, qui venait de recevoir de nouvelles troupes de Rome, et il revint dans ses Etats.


5- Douze ans s’étaient à peine écoulés depuis l’appel aux armes du roi des Allobroges, lorsque les Gallitae furent de nouveau  appelés à combattre contre les Romains, au siège de Marseille ; voici dans quelles circonstances. L’an 49, Jules César se rendait en Espagne pour y apaiser un soulèvement contre la domination romaine. En traversant la Provence, il voulut obliger les Marseillais à renoncer entièrement au parti de Pompée, son rival. Sur leur refus, il assiégea Marseille, et comme il prévoyait que le siège pouvait être long, il en confia les opérations à ses lieutenants et il continua sa marche vers l’Espagne.
Les assiégés résistèrent longtemps, grâce au secours de leurs alliés, les audacieux et intrépides montagnards connus sous le nom d’Albiques ou Albiciens. Ils formaient une confédération composée de huit peuplades, savoir : les Blodontii ou Bledontii, chef-lieu Digne ; les Avantici, sur le Vançon ;
Note (9) les Gallitae, chef-lieu Allos ; les Veamini, chef-lieu Thorame ; les Verguni, chef-lieu Vergons ; les Suetri ou Salinae Suetriorum, aujourd’hui Castellane ; les Sentii, chef-lieu Senez, et les Reienses, chef-lieu Riez, capitale de la confédération.
"Cette manière d’envisager les Albiciens comme un peuple collectif, dit Henri,
s’accorde avec Strabon, qui n’a placé que deux peuples au nord  des Salyens, et avec le récit de Jules César, qui, dans ses Commentaires, fait des Albiciens les habitants des montagnes situées au delà de Marseille....
Comment supposer, en effet, que les habitants de cette ville eussent appelé à leur secours quelques villageois qui auraient suffi à peine pour remplir un vaisseau.
Le recrutement fait parmi les Albiciens fut très considérable, puisqu’on put embarquer un grand nombre de soldats sur toutes les galères de la flotte marseillaise dont ils faisaient la principale force, et que sans doute il devait en rester encore des cohortes dans la ville.
Note (10)

La peuplade des Gallitae a donc pris part au siège de Marseille, avec les autres peuplades de la confédération, et César lui-même a été forcé de faire ainsi l’éloge de leur bravoure :
Note (11)
"On combattit de part et d’autre, tant sur terre que sur mer, avec un courage et une ardeur incroyables. Les Albiciens, montagnards endurcis et exercés au métier des armes, ne le cédaient pas de beaucoup aux  nôtres en intrépidité. "
Toutes les fois qu’il fallait combattre de près ou faire des sorties, c’était à leur valeur qu’avaient recours les assiégés.
A la fin pourtant, la tactique romaine l’emporta, et Jules César, de retour d’Espagne, paraissait sous les murs de Marseille pour recevoir la soumission des habitants, les désarmer et leur imposer une garnison romaine. Non content de la soumission de la ville assiégée, le conquérant, irrité contre les âpres montagnards dont la bravoure avait si longtemps prolongé le siège, détacha une partie de ses légions pour venir attaquer ces tribus chez elles.

6- Les Reienses reçurent le premier choc, soit parce que leur territoire se trouvait le premier sur le passage de la colonne romaine, soit parce que leur chef-lieu était la capitale des Albiciens. Ils se défendirent vaillamment, mais ils furent écrasés par le nombre , et les guerriers de la confédération qui combattaient avec eux se replièrent vers les montagnes, pour défendre leurs foyers. Les Romains voulaient soumettre non seulement les Reienses, mais toutes les tribus confédérées, par conséquent toute la région qui s’étend depuis Riez jusqu’à Allos et depuis Sisteron jusqu’à Castellane, et ils remontèrent la Durance et le Verdon, ayant, dit-on à leur tête le conquérant de la Gaule lui-même.
En effet, d’après l’historien de Barrême, "  c’est une tradition constante, dans nos pays, que César les aurait visités en personne." Digne, par exemple, l’aurait vu et reçu en ennemi, et celui-ci l’aurait caractérisée en termes plus que sévères. Le village de Champtercier devrait son nom à un champ de bataille  où César aurait vaincu, pour la troisième fois, les peuples des Alpes (campus tertius), ou bien à une station militaire établie pour en garder les passages. Plus loin, le pont Julien, sur le Verdon, entre Saint-André-de-Méouilles et Castellane, porterait encore le prénom (Julius ) du grand capitaine qui l’aurait jadis fait construire pour donner passage à la voie prétorienne que suivaient ses légions
Note (12)
Ce pont, reconstruit plus d’une fois, garde toujours son nom, et le voisinage de Vergons, où passait la voie prétorienne, nous porte à croire qu’il est un témoin de la conquête partielle de nos Alpes par Jules César.
Mais cette conquête ne fut définitive que pour Riez et les environs de cette ville ; la soumission des autres peuplades albiciennes et de toutes les Alpes était réservée à l’empereur Auguste, neveu de Jules César.